MOOD : DésAmour 2.0 ?

       

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 Si dans un passé pas si lointain, les hommes devaient nous faire la cour avant de nous faire l'amour, c'était avant que les sites de rencontres et autres applications du même genre ne viennent à jamais casser les codes de la séduction traditionnelle.

Avant Tinder et compagnie, les mâles s'efforçaient de choisir une cible, de personnaliser leur approche, de payer la note au resto et il faut avouer que c'était du boulot.

Quand on choisit l'âme sœur pour son selfie de profil et en fonction d'une introduction attrayante, ne revient pas à prendre, le risque que bellebrune83 soit en réalité grosbrun75 ? Ou tout bonnement ne risque t-on pas de perdre des heures de son temps et de flinguer sa batterie ?

Maintenant que les putes refoulées se déguisent en célibataires éplorées et que les célibataires esseulées se se comportent comme des putes, comment faire pour démêler le vrai du faux ?

Parce que, soyons réalistes, comment un homme politiquement correct, bien sous tout rapport  peut-il trouver la femme de ces rêves sans risquer de tomber sur son oncle aussi obsédé qu'obèse, fan du keno et de Larusso? Rien n'est moins sûr. N'oubliez pas que même un chimpanzé peut pianoter.

Bien sûr, ces sites ont du bon. Selon Enquêtes exclusives, depuis leur apparition, la première fois tarifée a disparu de l'hexagone...
Pourquoi payer quand on nous offre tout sur un plateau sans rien demander de plus qu'une petite canette de desperados post coitale ? Quand on revendique cent euros de plus par mois sur des ronds points, on sait qu'il ne faut pas jeter son argent par les fenêtres.

Nous pourrions continuer à en parler longtemps mais l'essentiel étant de ne pas négliger le danger occasionné par ce genre de pratique. Nous ne savons jamais qui se cache derrière un pseudo enjôleur et quelques promesses d'avenir finement pesées. Nous ne connaissons rien du passé de ce crush si charmant dont la photo ferait frémir Cupidon en personne. Comme dirait Orelsan, " Les dauphins sont des violeurs, méfie-toi des apparences. Basique". Alors, avançons à pas de velours...



Et sinon, en vrai ça donne quoi ?



     Dakota comme nous l'appellerons ici est un vendeur de quarante ans. Il se fait appeler ainsi parce que ça sonne mieux que Mustapha et il adore raconter à qui veut l'écouter son séjour aux Etats-Unis quand il avait vingt ans. Inutile de vous dire que c'était il y a belle lurette. Prenant un accent ricain douteux quand il évoque l'Empire State Building, à bien regarder l'expression faciale de ses interlocuteurs, ils seraient capables d'étrangler l'Oncle Sam en personne tant ils aimeraient que ce massacre linguistique cesse au plus vite.
J'ai connu Dakota quand il faisait le ménage dans un resto branché où j'aimais parader histoire de montrer à la face du monde mes nouveaux escarpins Jimmy Choo.
Le hasard me  fit retrouver Dakota au détour d'un rayon de chaussures d'un grand magasin. Même exaltation causée par la coke. Même maigreur spectaculaire. C'était bien lui en chair et surtout en os.
Je ne pensais pas le revoir lors de mon prochain déjeuner à l'extérieur mais parfois, les choses ne vont pas comme nous le voulons.


    Quelques jours plus tard, je revois mon amie d'enfance Marion pour un brunch dominical. Amie est un bien grand mot disons plutôt  qu'elle était la fille du meilleur ami de mon père et que ce statut lui donnait le droit de taper l'incruste chez moi entre mes six et mes onze ans. Les années ont passées et j'ai appris qu'elle était devenue serveuse et qu'elle vivait en colocation avec une femme à la langue et aux tétons percés. Marion avait grandit.

A chacun de nos repas, étant très  portée sur la bouteille, Marion enchaîne les verres de blanc sans avaler quoi que ce soit de solide. Sachant cela, je lui propose de manger dans un endroit où l'on ne me connait pas. Comme un homme marié sortant sa jeune maîtresse, je baisse les yeux en commandant, rougis quand on me porte mon assiette. Chaque client passant le seuil du restaurant me plonge un peu plus dans l'angoisse d'être démasquée. Une chose est sûre : Je paierais sûrement en espèces pour ne pas me faire griller.

      Je finis mon saumon fumé  quand elle en vient à me parler de Tinder, l'application qui est en train de lui changer la vie. Déjà vingt hommes de rencontrés. Deux cinés, un resto et le reste se composant de parts de pizzas surgelées et de bouteilles de vin bon marché lui confèrent une confiance en elle incroyable. Marion plait et désormais, elle le sait
Pour imager ses propos et me convaincre de l'aspect exceptionnel que possède ce site, elle décide de me montrer  comment  sélectionner les mâles. Surprise. Un des visages que je viens de voir sur l'écran de Marion c'est Dakota en personne, cotillons dans les cheveux fêtant apparemment le jour de l'an 2015 à en croire la pancarte qu'il tient dans les mains.

_ Regarde, me dit-elle solennellement, celui-là est pas mal du tout. Je balaie de ce côté et ce soir, je peux le rencontrer.

Souriant en reprenant une gorgée d'eau, je lui demande ce qu'elle cherche sur cette application. D'un rire strident, elle me jure qu'elle ne cherche qu'à prendre son pied. Intérieurement, j'endossais le rôle de la plus amusée de la tablée. Je m'étais toujours demandé ce qu'on pouvait trouver sur Tinder. J'avais ma réponse. Un allumé en solde et une nympho portée sur la bouteille. J'imagine déjà le visage de la nana candide qui tomberait par hasard sur Dakota ou encore le petit jeune romantique qui se trouverait face à Marion. Finalement, mieux vaut que les choses se passent ainsi.
J'ignore ce qu'il est advenu de leur rendez-vous. J'ignore s'ils ont matchés ou s'ils se sont mutuellement effrayés et tout compte fait, je pense que parfois, il vaut mieux rester dans l'ignorance !






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