Manipulateurs pervers narcissiques : Démêler le vrai du faux.

 

Manipulateurs pervers narcissiques : Démêler le vrai du faux.

A travers mes recherches sur la perversion narcissique, j'ai rapidement pu constater que nombreuses sont celles à se déclarer victime de MPN de manière aussi affirmée qu'arbitraire. La psychologie de ces individus qui n'hésitent pas à se cacher derrière l'image tant populaire du pervers narcissique m'a alors captivé. 

La rupture amoureuse, si elle n'est pas consentie ou justifiée, s'apparente parfois à un choc semblable à celui du deuil qui recoupe les mêmes étapes à savoir : déni - colère - introspection - acceptation. Les femmes qui choisissent de faire de leur ancien conjoint un pervers narcissique en réaction à une rancune ou à des émotions trop souvent enfouies restent bloquée à la phase du déni, mettant à mal le processus de reconstruction classique auquel nul amoureux éconduit n'échappe. Souvent, elles présentent des caractéristiques qui pourraient les rendre véritablement victimes de MPN à savoir un trouble narcissique appelé " narcissisme vulnérable." 

Par ce terme, comprenons que ces femmes souffrent d'une image dévalorisée d'elles-mêmes et que pour pallier à cette faille, elles choisissent inconsciemment de chercher l'approbation et donc la validation auprès d'autrui devenant ainsi dépendantes affectives et, par conséquent, particulièrement enclines à devenir un jour la proie d'un pervers narcissique ou autre personnalité toxique. Le rejet chez ces individus est alors vécu dans une souffrance telle que le risque de sombrer dans des addictions ou de commettre l'irréparable se voit considérablement accru. Une personne souffrant de ce trouble, si elle venait à se faire quitter par celui sur qui repose sa santé mentale ne se remettra jamais en question et cherchera dans l'autre les raisons de cet échec. Faire de son ancien amant un pervers narcissique devient donc la dernière option pour se déresponsabiliser avant de trouver un nouveau support affectif. Aussi, n'est-il pas rares que ces femmes passent plus rapidement à autre chose que celles qui présentent une intériorité complète parce qu'il faut bien comprendre que le socle de la relation n'est nullement l'amour mais bien la dépendance. 

Anna a rencontré Max au travail. Ils s'entendent bien et finissent par décider de boire un verre ensemble après le boulot. Pour la jeune femme, le rendez-vous s'est bien passé si bien qu'elle s'empresse de lui envoyer un texto pour lui proposer une seconde entrevue. Le message reste sans réponse. Rapidement, Max bloque Anna sur les réseaux sociaux et ne la salue plus au travail. La jeune femme s'imagine alors avoir face à elle un pervers narcissique et décide de s'inscrire sur un groupe Facebook spécialisé pour raconter son histoire. Deux semaines plus tard, après avoir fait la connaissance de Yvan sur une application de rencontre, elle tourne définitivement la page et quitte le groupe en question.

Il ne faut pas être doctorant en psychologie pour se rendre compte que dans l'exemple précédent, la jeune Anna n'a nullement eu à faire à un MPN. Il ne faut pas non plus être devin pour comprendre que la pression qu'elle a exercé sur cet homme en proposant directement une seconde rencontre a engendré sa fuite. Evidemment, le comportement de ce dernier, très représentatif de notre époque, n'a rien d'élégant mais il ne s'agit en rien d'une manifestation du trouble pervers narcissique. 

Alors me direz-vous, comment faire pour distinguer un goujat d'un véritable pervers narcissique clinique? C'est ce que je vais tenter de vous expliquer dans cet article. 

Pour se faire, commençons déjà par évoquer la fidélité. La construction d'un couple passe, la plupart du temps du moins, par ce cap. Lorsque deux personnes commencent à s'attacher une à l'autre, c'est tacitement que l'homme et la femme ne vont plus voir ailleurs. Il s'agit d'une suite logique des choses sur laquelle on ne mets généralement pas de mots. Associer la fidélité et son ennemie, l'infidélité à la pervers narcissique fait office de non sens. Pour que fidélité il y est, il faut que deux personnes entretiennent une relation d'égal à égale où l'autre est considéré comme un sujet et non comme un objet ou faire valoir chose qui n'est pas le cas avec un pervers narcissique. Le MPN, même si vous le connaissez depuis des années, même s'il y a eu engagement officiel, ne sera jamais en relation avec qui que ce soit. La non relation qu'il entretient est basée sur l'unilatéralité. La proie donne - son temps, son énergie, son amour - le MPN reçoit. Jamais le schéma inverse ne se produira et si parfois le pervers donne l'impression de se préoccuper des besoins de sa victime, il ne s'agit que d'une illusion ( souvent présente en période de love bombing ) visant à resserrer l'emprise psychologique. Par conséquent, se déclarer victime de l'infidélité d'un MPN est impropre puisque cela reviendrait à le considérer comme un individu lambda. Or, le pervers narcissique, s'il est conscient de sa nature feindra toujours la normalité, non seulement pour refléter une image parfaite de lui-même mais également pour ne jamais être démasqué. La fidélité devient donc un outil pour déstabiliser sa proie et jouer avec ses sentiments et sa morale. C'est donc progressivement que le MPN va pervertir le rapport à la fidélité de sa cible, en banalisant l'infidélité et en incorporant insidieusement ce tiers dans la non-relation. 

Dans une relation amoureuse ou encore dans un processus de séduction, un homme non MPN, s'il venait à développer une seconde relation, fera d'abord en sorte de la dissimuler avant d'éventuellement s'expliquer et de prendre les décisions qui s'imposent. Le pervers narcissique, quant à lui, n'aura de cesse de laisser des indices grossiers afin de jouer avec les nerfs de sa victime jusqu'à mettre sa proie de substitution en première ligne pour mieux la torturer. Un MPN pourra donc vanter les mérites de l'intruse, simuler un choix à faire et même parfois faire en sorte que la proie Alpha et la proie de substitution se retrouvent confrontées une à l'autre. Cette entreprise lui permettra d'avoir une preuve concrète de sa toute puissance tout en faisant souffrir deux victimes à la fois ainsi est-il courant de voir ce procédé nommé triangulation apparaître en période de destruction.

Jessy a presque quarante ans et travaille dans un cabinet d'avocats. Depuis un an, elle fréquente occasionnellement un juriste qu'elle a rencontré durant le pot de départ d'une de ses collègues. Un soir, alors qu'ils viennent de faire l'amour, elle lit, par hasard, le sexto d'une autre. Lorsqu'elle lui donne des explications, son partenaire lui répond que c'est une erreur de numéro et qu'il est lui-même contrarié de recevoir de pareils messages. 

Dans cet exemple, il n'échappera à personne que l'ami de Jessy désire la garder sous le coude et n'hésite pas à user d'un mensonge grossier pour ne pas la perdre. 

Sophie, mariée depuis deux ans à Khaled, apprends de la bouche d'un ami commun que son époux a une maîtresse. Quand elle lui demande des explications, Khaled se retrouve pris d'un fou rire avant de lui lancer froidement qu'il ne pourra pas continuer longtemps à vivre avec une femme paranoïaque et crédule prête à croire le premier venu. Quelques temps plus tard, Sophie reçoit un message sur Messenger d'une inconnue lui disant que son mari ne l'aimait plus et que c'était désormais elle sa priorité. Comme toute réponse, Khaled se contente de vanter les mérites de sa maîtresse, prétextant qu'il était impossible de résister à une fille aussi jeune et aussi belle mais qu'il lui fallait du temps pour savoir laquelle il choisirait. Evidemment, pour que la proie de substitution se manifeste, il aura fallu qu'il use des mêmes arguments, donnant le point de départ d'un bras de fer entre victimes. 

Nous reconnaissons ici le mécanisme de la triangulation précédée d'une phase de culpabilisation. Nous ne pouvons néanmoins pas parler d'infidélité dans le sens premier du terme parce que même si sacrement il y a, un MPN demeure toujours un prédateur agissant selon son propre intérêt, n'hésitant pas à s'en aller si la proie Alpha ne lui apporte plus les ressources pour lesquelles elle a été choisie.

Attention cependant à ne pas se méprendre sur le mensonge, très dominant de la personnalité narcissique perverse. Si le MPN ne cache pas ses écarts, en joue pour asservir sa victime et va même jusqu'à banaliser son comportement, il n'en demeure pas moins un menteur pathologique. Un individu lambda mentira pour se valoriser, cacher une vérité dérangeante ou encore éviter de faire souffrir autrui, un MPN usera du mensonge de manière permanente. Toutes les informations données par un pervers narcissique sont caduques et ce, même s'il s'inspire constamment d'un fait réel, l'ensemble des propos tenus par un MPN ne visent qu'à séduire ( love bombing), asservir ( emprise), détruire ( rage narcissique). 

La "Pervers narcissique mania " aura fait du bruit, mettant en lumière une personnalité toxique jusqu'alors méconnue et même si elle blesse les victimes véritables, elle aura au moins eu le mérite de porter aux nues un autre souci majeur que notre société engendre, une génération au rapport à l'image biaisé rendant prépondérante la dépendance affective, la déresponsabilisation émotionnelle et la fuite en avant. Vivant dans l'instant et mise à mal par une crise économique générale, il est de plus en plus difficile pour les milléniaux de développer des rapports humains sains et durables basé sur la réciprocité et l'échange, rendant béantes les failles narcissiques des plus fragiles. Aussi le pervers narcissique s'il ne se rencontre pas à tous les coins de rues n'a pas fini d'endosser les torts de ceux pour qui l'introspection se révèle impossible. Bourreau des uns, bouc émissaire des autres, il ne fait aucun doute que cette personnalité complexe a de beaux jours devant elle ! 

Merci à tous pour vos lectures et commentaires !